Evaluation de la mise en œuvre de la loi n° 2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre

Evaluation de la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre

Le drame du Rana Plaza au Bangladesh le 24 avril 2013 a déclenché une réaction mondiale. Même si la prise en compte des enjeux sociaux, environnementaux et sociétaux par les entreprises existait déjà, tout comme les cadres et guides publiés par les organisations internationales (OCDE, ONU, OIT), l’opinion publique a réclamé que les entreprises multinationales assument pleinement leurs responsabilités dans une économie mondialisée.

En France, des ONG, des syndicats et les élus ont voulu aller plus loin que la « soft law » en militant pour la création d’une obligation légale. Après un parcours heurté, la loi n° 2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d’ordre a été adoptée.

Cette loi s’applique aux entreprises et groupes qui emploient deux années consécutives plus de 5 000 salariés en France ou plus de 10 000 en France et à l’étranger. Ils doivent établir, publier, respecter et évaluer un Plan de vigilance qui vise à identifier les risques et à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l’environnement dans toute leur sphère d’influence, les filiales comme les sous-traitants « en relation commerciale établie », ce qui représente des dizaines voire des centaines de milliers d’entreprises pour un seul groupe français.

La Loi liste les cinq volets du Plan de vigilance :

– une cartographie des risques ;

– des procédures d’évaluation régulière de la situation des filiales, des sous-traitants ou

fournisseurs ;

– des actions adaptées d’atténuation des risques et de prévention des atteintes graves ;

– un mécanisme d’alerte et de recueil des signalements ;

– un dispositif de suivi des mesures et d’évaluation de leur efficacité.

L’articulation avec les autres obligations, notamment de déclaration de performances extra-financières, touchant à de multiples enjeux depuis 2002, et de lutte anti-corruption, n’est pas simple car les limites de chacune diffèrent et les entreprises voient ainsi s’accroître d’année en année le poids de ces obligations de « reporting ».

Le passage de la « soft law », reposant sur le volontariat, à la Loi a des conséquences lourdes pour les entreprises et peut conduire à des recours judiciaires et à des sanctions. Les premières mises en demeure ont été déposées et tous les recours devront être suivis de près pour en analyser la portée.

Les études existantes et les analyses de la mission montrent que certaines entreprises ne respectent pas encore formellement le Devoir de vigilance alors que d’autres jouent bien le jeu et ont été récompensées publiquement par des évaluations et un Prix.

Les forces de la Loi se révèlent notamment dans la gouvernance plus élevée du Devoir de vigilance, par rapport à celle d’autres politiques comme la Responsabilité sociétale des entreprises, mais aussi dans des efforts pour utiliser des référentiels pertinents (ceux de l’OIT, de l’OCDE et de l’ONU sur les Droits de l’homme et les entreprises multinationales, notamment), adapter des outils préexistants ou en créer de nouveaux pour son application.