Nouvelle législation européenne sur l’économie numérique : ce qu’on peut attendre du « Digital Services Act »

 

Par Florence G’sell, Professeur à l’Université de Lorraine, et Filippo Lancieri, Fellow, Stigler Center at UChicago Booth

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyden, a souhaité l’adoption d’une nouvelle stratégie relative à l’économie numérique. Le paquet « Digital Services Act » est attendu pour décembre 2020.

Pourquoi l’Union européenne envisage-t-elle d’adopter une nouvelle législation relative à l’économie numérique ?

Pour résumer, l’on pourrait dire qu’il y a deux types de circonstances qui justifient l’adoption d’une nouvelle législation par l’Union européenne (UE).

Le premier type de circonstances tient à l’émergence, dans le secteur du numérique, d’entreprises puissantes dotées de caractéristiques inédites et très particulières. L’UE a pris acte du fait que l’émergence de ces immenses plateformes que nous désignons souvent par l’acronyme « GAFAM » pose des difficultés nouvelles qui ne résultent pas seulement de leur taille ou de leur dimension transnationale mais aussi des particularités de leur modèle d’affaire et de leur impact considérable sur l’opinion. Non seulement le gigantisme des plateformes leur permet de jouer un rôle majeur dans leur secteur d’activité – qu’il s’agisse de la distribution, de l’intermédiation ou de l’information – mais celles-ci disposent de cet actif stratégique que sont les données. Leur modèle d’affaire, qui mêle marchés multifaces, accès en ligne sur des applications propres et exploitation de données massives, est d’autant plus particulier qu’elles sont en mesure de se placer en concurrence avec les acteurs de la plateforme tout en en maîtrisant l’architecture.

Le second type de circonstances est la reconnaissance, par les autorités européennes, que les outils qu’elles ont à leur disposition sont insuffisants pour traiter des problèmes posés par ces entreprises. Bien que la Commission européenne et les États membres de l’Union soient les plus actifs au monde en termes d’enquêtes antitrust relatives aux entreprises du numérique, les amendes et sanctions prononcées, bien qu’importantes, n’ont pas permis de renforcer la compétition sur ces marchés. En outre, des instruments de régulation plus souples, comme le Règlement (UE) 2019/1150 du 20 juin 2019 relatif aux entreprises utilisatrices de services d’intermédiation en ligne, sont généralement considérés comme insuffisants…

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