Transparence : cinq choses à savoir sur les lobbies en France

Transparence : cinq choses à savoir sur les lobbies en France

Depuis le premier janvier dernier, la justice peut prononcer des sanctions à l’encontre des groupes de pression qui ne s’inscrivent pas au registre de l’administration.
La pression monte sur les lobbyistes. Depuis le premier juillet 2017, les groupes d’intérêts qui exercent une influence sur les pouvoirs publics ont l’obligation de s’inscrire sur un répertoire mis à disposition par la haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATPV). À l’occasion des six premiers mois d’inscription, l’institution a publié il y a quelques jours un premier bilan passé inaperçu qui contient pourtant un éclairage approfondi sur l’identité des acteurs exerçant des pressions sur les élus et représentants de la nation.
Il y aurait au total selon le comptage arrêté à ce jour, 858 représentants d’intérêts inscrits sur le répertoire. Un chiffre qui apparaît relativement faible au regard d’autres pays comme l’Italie (1.680 inscrits) ou le Canada (5.731 inscrits). Parmi les acteurs enregistrés, figurent aussi bien des multinationales comme LVMH, Google France, ou Facebook France que des ONG comme Greenpeace.
1 – Qu’est-ce qu’un lobby ?
Pour définir un représentant d’intérêt, la HATPV a retenu, dans le cadre de la loi, trois conditions relativement précises qui entraînent certaines obligations :
* Un représentant d’intérêt peut être une personne morale, c’est à dire une entreprise (publique ou privée), un cabinet d’avocats ou une société de conseils, un syndicat. “Un représentant d’intérêts peut également être une personne physique qui exerce à titre individuel, par exemple un consultant ou un avocat indépendant.”
* Il doit également exercer une activité de représentation d’intérêts, “c’est-à-dire qu’il prend l’initiative de contacter un responsable public pour essayer d’influencer une décision publique.” Il s’agit souvent d’une loi ou d’une réglementation.
* Il doit enfin exercer cette activité de façon principale ou régulière. “Il s’agit d’une activité principale s’il consacre plus de la moitié de son temps, sur une période de six mois, à préparer, organiser et réaliser des actions de représentation d’intérêts. Il s’agit d’une activité régulière s’il a réalisé à lui seul plus de dix actions d’influence au cours des 12 derniers mois”.
2 – Quelles sont leurs obligations ?
Outre l’inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts, ils ont l’obligation de fournir des informations sur l’identité de leur organisation et les sujets pour lesquels ils exercent une influence ou une pression. Ils doivent également effectuer tous les ans une déclaration d’activités auprès de la HATPV avec des données assez précises sur le type d’actions engagées, les responsables publics contactés (une rencontre en tête à tête, une conversation téléphonique ou encore un échange par mail).
3 – Quelles sanctions prévues ?
La loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique a prévu de sanctions pouvant aller jusqu’à 15.000 euros d’amende et un an d’emprisonnement si les représentants n’ont pas rempli leurs obligations déclaratives. Ils doivent par ailleurs respecter d’autres règles lorsqu’ils rentrent en contact avec des élus ou lorsqu’ils organisent des colloques auxquels ils invitent des responsables publics. Un lobbyiste ne doit pas :
* offrir de cadeau à un responsable public ;
* rémunérer un responsable public pour le faire intervenir dans un colloque ;
* essayer d’obtenir des informations par des moyens frauduleux ;
* vendre les informations ou les documents qu’il obtient auprès d’un responsable public.
4 – Quels sont  les secteurs concernés ?
D’après la liste des représentants obtenue à la fin de l’année par l’administration, l’environnement arrive en tête des sujets les plus régulièrement signalés par les groupes de pression, suivie de l’économie et du domaine du travail. Les représentants peuvent néanmoins déclarer jusqu’à cinq secteurs dans lesquels ils exercent une influence. Les inscrits au registre font majoritairement partie de sociétés ou d’organisations professionnelles comme l’illustrent le graphique ci-dessous.
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Répartition deslobbyistes par typed’organisationRépartition des lobbyistes par type d’organisation

5 – Une phase d’inscription difficile
La mise en place de ce registre a soulevé des réserves et des critiques. Cela s’est traduit dans la phase d’inscription qui s’est révélée “difficile” souligne la haute autorité. “De nombreux efforts de pédagogie ont dû être déployés pour informer et sensibiliser les représentants d’intérêts au dispositif.” Elle a par ailleurs repoussé le calendrier d’inscription au vue de toutes ces difficultés et s’inquiète déjà de son extension aux collectivités locales à compter du premier juillet 2018.
“Du fait des très nombreuses interactions qui se nouent quotidiennement entre les élus locaux et les acteurs de la vie économique et sociale locale, elle craint que la complexité du dispositif ne conduise à sa dilution”.
Par ailleurs, le manque de moyens humains de la HATPV, évalués à 50 agents, pourrait accroître les difficultés de contrôle comme le soulignait Jean-Yves Lucas, référent de l’association Anticor, spécialisée dans la lutte contre la corruption politique dans les colonnes de Libération. “Le problème c’est que la HATVP n’a pas suffisamment de moyens humains et financiers pour faire face à tous les contrôles qui lui sont demandés de manière rapide”. Une aubaine pour les récalcitrants.
> Lire aussi : Transparence de la vie publique : les lobbyistes traînent des pieds pour s’inscrire au registre